vendredi 20 avril 2018

Boudicca / Jean-Laurent Del Socorro

Quatrième de couverture :

"Angleterre, an I. Après la Gaule, l'Empire romain entend se rendre maître de l'île de Bretagne. Pourtant la révolte gronde parmi les Celtes, avec à leur tête Boudicca, la chef du clan icène. Qui est cette reine qui va raser Londres et faire trembler l'empire des aigles jusqu'à Rome ?

A la fois amante, mère et guerrière mais avant tout femme libre au destin tragique, Boudicca est la biographie historique et onirique de celle qui incarne aujourd'hui encore la révolte."



"Il n'y a pas de honte à renoncer car seuls les dieux ne connaissent pas la peur. Je ne vous jugerai pas. Je vous pose simplement la question : serez-vous, aujourd'hui, à mes côtés ?"


Mon avis :

Ce mois d'avril sera épique ou ne sera pas ! Je continue sur ma lancée, ayant soif d'aventures. C'est en suivant l'actualité du festival Les Imaginales (https://www.imaginales.fr/) que j'ai eu connaissance de ce roman, en lice pour le prix Imaginales des bibliothécaires. Je ne ferai pas partie des bibliothécaires votants, n'ayant pas pris le temps de m'y intéresser concernant l'inscription, mais pourquoi pas une prochaine fois ? J'espère déjà pouvoir me rendre au festival.
Quoiqu'il en soit, ce roman me tentait beaucoup.

Si j'ai aimé découvrir la vie de Boudicca (ou Boadicée), que je ne connaissais absolument pas, je n'ai en revanche pas ressenti de plaisir exceptionnel à la lecture. La plume est bonne, certains passages sont très beaux voire émouvants, mais globalement cette lecture me laisse sur une impression mitigée.

En cause : le récit très direct qui ne prend, à mes yeux, pas la peine de développer la psychologie des personnages (sauf de Boudicca, bien sûr, mais qui ressent au final souvent la même chose). C'est compréhensible, dans la mesure où l'auteur a fait avec les informations dont il disposait, qui doivent être connues seulement dans les grandes lignes.
Ainsi, si certains passages (en lien avec son rôle de mère notamment) sont magnifiques et ont remué quelque chose en moi, le reste du récit m'est apparu assez lapidaire, comme une succession de faits rapportés sans grande émotion.

Quant à la fin, je l'ai trouvée originale. Alors que la biographie, à proprement parler, de Boudicca se termine, l'auteur enchaîne sur une nouvelle qui semble n'avoir rien à voir avec le roman. Elle concerne d'autres personnages, une autre période de l'histoire... Il s'agit de la Boston "tea party" : https://fr.wikipedia.org/wiki/Boston_Tea_Party. Et pourtant, les motifs de révolte semblent les mêmes que ceux qui ont animé Boudicca et son peuple. Ce qui fait que l'on referme le livre en songeant différemment aux révoltes, et que les "gentils" habitants de Britannia peuvent apparaître plus tard comme des colonisateurs à leur tour.

En bref, un livre intéressant qui aurait pu me plaire davantage, mais qui pourra faire mouche chez les personnes qui n'aiment pas trop les biographies romancées.
Pour ma part, sur un thème un peu semblable, j'ai préféré Le Pas de Merlin, de Jean-Louis Fetjaine, qu'il faudrait que je relise si je veux en parler ici. J'en avais gardé un bon souvenir, mais qui date... Signalons également la nouvelle trilogie (en cours de publication et que je n'ai pas encore lue) de Jean-Philippe Jaworski, Les Rois du Monde, également à propos de la conquête romaine, mais de la Gaule cette fois.

vendredi 13 avril 2018

Janua Vera / Jean-Philippe Jaworski

Quatrième de couverture :

Entrez dans le Vieux Royaume.

De Montefellòne à Ciudalia en passant par Bourg-Preux, venez en découvrir les mystères.

Et si vous croisez un certain Benvenuto : tremblez !




Mon avis :

On aura rarement fait plus lapidaire, comme quatrième de couverture, mais elle se suffit à elle-même ! Je lis le recueil des Récits du Vieux Royaume : y sont compilés les nouvelles regroupées sous le titre de Janua Vera et le roman Gagner la guerre. Faisant plus de 1000 pages au total, et lisant lentement, j'ai choisi de faire deux articles pour éviter d'attendre trop longtemps avant de donner mon avis très enthousiaste.
Voici donc mon avis sur Janua Vera.

Ces dix nouvelles se déroulent toutes dans le Vieux Royaume, un monde imaginaire aux accents parfois médiévaux, aux décors parfois méditerranéens au temps de la Renaissance. Dans tous les cas, l'ambiance est superbe et on se laisse happer à chaque fois ! Je me suis parfois fait la réflexion qu'il manquait peut-être une carte pour visualiser encore mieux l'univers, mais cela ne nuit toutefois pas à la compréhension et permet de mobiliser l'imagination de chaque lecteur.
Chaque nouvelle est différente de sa voisine, avec son intrigue propre, son atmosphère propre, ses personnages marqués.
J'ai même eu l'impression que le récit suivant était meilleur que le précédent, ce qui un exploit quand on a déjà adoré ce qu'on vient de lire. J'ai vraiment été surprise par ce point. Ce qui m'a plu également, c'est la fin donnée à chaque nouvelle, qui ne se clôt pas de manière définitive, car on peut en effet retrouver un personnage qu'on n'a fait que croiser dans un récit précédent ; mais aussi il s'agit de fins ouvertes. Elles laissent bouche bée, elles donnent à réfléchir, ce qui peut paraître parfois frustrant, mais qui me plaît personnellement, car cela me permet de rester encore un peu en compagnie des personnages une fois ma lecture finie, à m'interroger sur les implications et la signification d'une telle fin.

La force de ce recueil réside aussi dans la plume de Jean-Philippe Jaworski. Quelle claque ! Un véritable coup de foudre ! Il manie les mots tel un orfèvre : richesse du vocabulaire, comparaisons originales, bonne connaissance de l'univers médiéval-fantastique, ...
Il maîtrise tous les styles avec brio, pouvant ainsi décrire une bataille, une errance, écrire un conte grave teinté de mélancolie, rapporter une légende rurale inquiétante, faire naître une véritable angoisse alors qu'on est au chaud dans son canapé ou dans son lit, détendre l'atmosphère avec une nouvelle humoristique, etc.

Toutes les nouvelles m'ont marquée, m'ont fait vivre des sensations différentes comme rarement un livre ne l'a fait. Je n'ai vraiment rien à redire, tout est parfait : un grand auteur à connaître !

samedi 7 avril 2018

Notre-Dame-aux-Écailles / Mélanie Fazi

Quatrième de couverture :

"Saviez-vous qu'à Venise, qui vole des soupirs encourt la vengeance de la ville ? Connaissez-vous vos plus sensuelles métamorphoses, lorsque vous êtes loup, lorsque vous devenez lionne ? Avez-vous déjà pris un fleuve pour amant ?
Partez à la découverte des troubles secrets de l'âme et des lieux les plus hantés : une villa qui palpite des vies enfuies, l'océan dont certains ne reviennent plus tout à fait humains, ou encore ce train de nuit qu'empruntent ceux qui cherchent l'oubli...
Mais attention : de ces voyages intimes et inquiétants, on ne rentre pas indemne."




Mon avis :

Je connaissais Mélanie Fazi de nom, ayant lu plus jeune Trois pépins du fruit des morts. Je serais bien incapable de développer plus amplement mon avis. Le temps passe, et les lectures avec...
Lorsque j'ai vu ce livre à la médiathèque, j'ai pensé qu'il pourrait me permettre de me plonger dans l'univers de l'auteure. J'ai été attirée par son titre qui m'a paru si poétique et suffisamment fantastique pour me plaire. La quatrième de couverture a achevé de me séduire ; il fallait que je reparte avec.
Je ne me suis pas trompée.

Douze nouvelles sont regroupées dans ce recueil, plus ou moins longues, aux noms évocateurs :
La cité travestie, En forme de dragon, Langage de la peau, Le train de nuit, Les cinq soirs du lion, La danse au bord du fleuve, Villa Rosalie, Le nœud cajun, Notre-Dame-aux-Écailles, Mardi gras, Noces d'écume, Fantômes d'épingles.

J'ai trouvé la plume de Mélanie Fazi très poétique, sans être inaccessible. C'est beau.
J'ai vécu des lectures très agréables, qui m'ont transporté loin, là où l'auteur voulait nous emmener (exploit qui fonctionnait également lorsque je lisais quelques lignes durant mes trajets en bus, c'est dire !). Elle a l'art de décrire si justement et si profondément des éléments pouvant paraître insignifiants : une musique, dans En forme de dragon, à tel point qu'elle prend forme dans notre esprit et qu'on regrette presque de ne pas en connaître le nom pour ensuite comparer les sensations ; une ville jusque dans ses moindres détails, comme si l'auteure la connaissait intimement, car tout le laisse à penser ; une maison sur laquelle je ne peux pas m'étendre, car c'est le sujet principal de Villa Rosalie...
C'est justement là sa force, c'est précisément ce détail qui fait qu'on est emporté dans l'histoire et que le retour à la réalité est parfois difficile. J'étais tellement proche des personnages, même en une courte nouvelle, que mon regard sur le monde réel après avoir fermé le livre m'a semblé différent.
Quel coup de maître !

Les sujets traités sont pourtant très durs, teintés de mort, de maladie, de folie... Mélanie Fazi choisit  de les aborder sous l'angle du fantastique, et je pense que c'est ce qui les rend plus supportables, plus lisibles pour moi en tout cas, tout en en ressortant quand même bouleversée. Bouleversée mais heureuse d'avoir lu de si belles lignes.

Un bémol ? On ne peut pas plaire à tout le monde, et donc certaines nouvelles m'ont moins touchée que d'autres. Mes préférées : Villa Rosalie et Notre-Dame-aux-Écailles, puis La cité travestie, La danse au bord du fleuve.

Une chose est sûre : je vais m'empresser de lire d'autres récits de Mélanie Fazi, ou peut-être vais-je faire durer le plaisir. Savoir qu'il me reste plusieurs de ses écrits à découvrir, ne serait-ce pas là l'assurance d'être "encore heureuse*" ?


*(Clin d’œil à Jules Renard en sous-titre de ce blog : "Quand je pense à tous les livres qu'il me reste à lire, j'ai la certitude d'être encore heureux.")

Je termine sur des photos de mon chat, qui a aussi adoré ce livre ! Le précédent emprunteur aimait aussi sans doute ces petits félins :-)